Partie 2 : conduite d'une recherche
Les principes de base de fonctionnement d'un DVA, et les différentes positions possibles des maxima pour la détection d'un DVA (émetteur) par un autre DVA (récepteur) étant maintenant connus, passons au côté pratique et voyons comment procéder pour localiser rapidement le DVA de la victime enfouie, et la victime, si elle a bien fixé son DVA sur elle sous ses vêtements pour éviter les risques d'arrachement.
III. Stratégie de recherche
Une recherche comporte plusieurs phases, à chaque phase correspond une tactique.
Chaque phase est décrite dans un paragraphe «Comment ça marche ?» suivi d'un autre paragraphe «Comment s'entraîner ?» qui propose des exercices.
1. Recherche visuelle
La première chose à faire est d'abord, après avoir mis son groupe en sécurité, de regarder. Rien ne sera plus rapide si une main sort de la neige que l'oeil exercé du skieur pour la repérer. Inspecter tous les indices de surface, en envoyant sur ces zones une personne avec un DVA en recherche qui donnera aussi quelques coups de sonde. En parallèle ou si rien n'est visible, passez les DVA tous en réception (ou éteignez ceux qui ne cherchent pas) et déterminez la zone de recherche. Commencez sous le point de disparition des ensevelis. Si vous ne les avez pas vu disparaître, sous la trace.
2- Recherche primaire ou du premier signal.
Comment ça marche [3,4] ?
Il faut balayer toute la zone dans laquelle peuvent se trouver les ensevelis. Pour cela il faut connaître la portée utile de son DVA. Si on est assez nombreux, s'espacer au maximum de deux fois la portée utile et descendre droit dans la pente (si on se trouve en haut, remonter si l'avalanche est au dessus, plus rare). Quand on capte un signal, on passe à la deuxième phase de recherche, avec un seul chercheur. Si plusieurs personnes sont ensevelies, les autres continuent à balayer la zone d'avalanche pour capter les signaux des autres victimes. Il est indispensable d'avoir un coordinateur qui vérifie que les chercheurs ne s'écartent pas plus que la distance maximale pendant la recherche.
Si l'on est seul, ou peu nombreux, le coordinateur participe à la recherche. Il divise la zone en fonction du nombre de chercheurs et chacun balaye complètement sa zone, le coordinateur se trouve légèrement en amont des autres pour veiller à la bonne couverture. Chaque chercheur effectue une traversée horizontale de sa zone, puis descend droit dans la pente d'une distance maximale de deux fois la portée utile, refait une traversée horizontale, descend dans la pente....etc...ou bien descend en zigzag (traversée légèrement descendante-conversion- traversée légèrement descendante dans l'autre sens...) en faisant bien attention de ne pas trop descendre pour bien couvrir sa zone.
Ne pas oublier d'orienter votre DVA dans toutes les directions pendant la recherche, en le tournant lentement (laisser le temps au DVA de répondre) aussi bien dans un plan horizontal que vertical (si par hasard, le DVA enfoui est vertical), ce qui veut dire également que votre déplacement ne doit pas être trop rapide (évitez les schuss).
Comment s'entraîner ?
- Il faut avoir une idée de la portée utile de son DVA. La portée d'un DVA est maximale quand les antennes sont coaxiales, c'est cette portée qui est souvent indiquée dans les documents des fabriquants, elle ne correspond pas à la portée utile.
On peut le vérifier en le testant dans différentes configurations et avec différents DVA émetteurs (de marques différentes si possible). Ce test peut être fait assez rapidement lors du contrôle de DVA au départ de la randonnée. A savoir, le signal dépend du cosinus de l'angle entre l'antenne et le champ, donc diminue lentement quand on s'écarte du maximum (0°, antenne et lignes de champ parallèles) , et augmente rapidement quand on s'écarte du minimum (90°, antenne et lignes de champ perpendiculaires) ce qui est une chance pour nous.
Cette portée utile est souvent donnée de l'ordre de 10m, on trouve souvent plus lors de tests, car les DVA ne sont pas enfouis, il faut en plus prendre une marge de sécurité car le DVA de la victime peut avoir des piles usées.
- Il faut connaître le temps de réponse de son appareil pour adapter sa vitesse. Poser un appareil en émission et déplacez votre DVA au dessus. Observez les indications.
- En descente, quand il n'y a pas de risque (!!) et que vous n'avez pas une poudreuse de rêve. Le premier décrit une zone à couvrir, descend d'environ 200m en distance et cache son DVA. Les autres s'organisent, avec un coordinateur qui participe ou non à la recherche.
- En montée, le même exercice est possible en simulant une avalanche venant d'en haut et emportant un skieur en amont, mais si le groupe peine un peu, ce n'est pas forcément motivant.
- Pendant la pause déjeuner, cela prend peu de temps (et oblige certains à s'arrêter un peu).
3- Recherche secondaire: A la poursuite de la ligne de champ
Comment ça marche ?
Il faut suivre au mieux la ligne de champ, mais attention une fois capté le premier signal, vous êtes quelque part sur la ligne que vous pouvez suivre dans un sens ou dans l'autre. Si vous choisissez le bon sens, vous allez vous rapprocher, le signal va augmenter, si vous vous trompez, le signal va diminuer, car la distance augmente. N'hésitez pas , faites demi-tour. Rappelez-vous la figure 3 , partie I, si vous vous trouvez en b, le bon sens est celui de la flèche.
Avec un DVA numérique, une indication lumineuse vous donne la direction à suivre (mais pas le sens), l'analyse du signal est suffisamment rapide pour que cette indication vous soit transmise pendant votre déplacement. Avec un DVA analogique, c'est à vous de la déterminer en orientant votre DVA et en partant dans la direction de signal maximal. Suivant le niveau d'entraînement, cette détermination de direction est plus ou moins rapide et peut même nécessiter des arrêts. En cas de difficulté à localiser le maximum, il faut localiser les deux minima et partir entre les deux, au milieu. Il faut aussi régler l'amplificateur pour avoir un son assez faible, car un son trop fort sature l'oreille et gène la détermination du maximum. Cette détermination est beaucoup moins précise avec un DVA analogique (qui ne comporte qu'une antenne) qu 'avec un DVA numérique (utilisant généralement 2 antennes perpendiculaires en réception). Avec un numérique on suit vraiment la courbe, alors qu'avec un analogique, on la tangente grossièrement par « segments de droite ». Quand on est proche de la victime, amplificateur de signal au minimum (ou presque si le DVA est profondément enfoui) sur un analogique, ou distance affichée inférieure à quelques unités « 1, 2 ou 3 » sur un numérique (ou bien affichage de l'orientation semblant aléatoire), il faut passer en recherche finale. Cette troisième phase est indispensable dès que l'enfouissement est un peu profond, donc presque toujours car sinon il y a des indices de surface.
Comment s'entraîner ?
- Pour débuter, mettre un DVA près de la surface. Quand on maîtrise le suivi d'une ligne de champ, il faut s'entraîner avec des situations plus proches de la réalité.
- S'habituer à l'affichage de son DVA en enfouissant un autre DVA à différentes profondeurs.
- Cacher un DVA dans un terrain accidenté, en pente, si possible dans une coulée d'avalanche, pour se familiariser avec les problèmes de déplacement pendant une recherche.
- Cacher un DVA si possible à plus d'un mètre de profondeur pour s'habituer aux signaux faibles et déclencher la recherche finale, même si on n'est pas sur le maximum de sensibilité de l'appareil. Cet exercice sera couplé avec la phase de recherche finale.
Quid de la méthode en croix pour la recherche secondaire ? Cette méthode était enseignée il y a pas mal d'années, elle ne l'est plus dans le cadre des formations de la FFCAM. Elle permet de retrouver les victimes, mais nécessite plus de déplacements, d'arrêts et donc beaucoup plus de temps que la méthode directionnelle décrite ci-dessus quelque soit le type de DVA utilisé, et en particuliers bien sur avec les DVA numériques étudiés spécialement pour faciliter la méthode directionnelle.
4- Recherche finale
Comment ça marche ?
Quand on se rapproche du DVA enfoui, les lignes de champ se resserrent et deviennent difficiles à suivre. L'information de direction devient confuse. La méthode classique reste la méthode en croix .
Figure 7 : Méthode en croix [3]. L'intensité du signal est représentée par la taille des caractères du « bip ». La longueur des déplacements est de l'ordre du mètre. Ne pas hésiter à faire 2 ou 3 mètres pour localiser d'éventuels maxima secondaires, en cas d'ensevelissement profond.
Le chercheur se déplace avec son DVA sur des segments de droite perpendiculaires entre eux en gardant bien son DVA toujours orienté dans la même direction. Quand il repère le maximum sur un segment de droite (en le dépassant pour bien vérifier que le signal décroît, et qu'il n'y a pas un autre maximum plus fort), il repart à 90° en faisant bien attention de garder la direction initiale de son DVA et refait de même. etc...Avec cette méthode, le chercheur finit par passer à la verticale du DVA enfoui et repère le maximum. Pour être sur de garder une direction constante, on peut tenir son DVA verticalement.
Deux autres méthodes pour chercheurs confirmés uniquement, à ne regarder que si vous maîtrisez déjà la recherche en croix.
Figure 8 : Recherche fine en cercle, le DVA est enfoui à une profondeur d.
- Localisation fine en cercle pour DVA analogique (1 antenne) [2].
Si le DVA enfoui est profond, on doit trouver plusieurs maxima éloignés, mais une recherche rapide ne donne généralement qu'un seul de ces maxima, qui n'est pas le principal. Les suisses ont adopté la méthode en cercle développée par Manuel Genswein pour résoudre correctement ce cas. Cette méthode s'applique quand la méthode en croix suivie d'un sondage n'a rien donné.
Elle consiste à localiser les maxima 2 et 4 de la figure 6, partie I pour chercher ensuite la victime entre les deux. Le chercheur tient son DVA verticalement. Un premier maximum est trouvé et marqué (en fin de recherche secondaire suivie d'une localisation plus fine en croix avec le DVA tenu verticalement), il décrit ensuite un cercle autour de ce point pour trouver le second tenant toujours son DVA verticalement (en le localisant précisément avec une recherche en croix quand il capte son signal). En se déplaçant entre ces deux maxima, il trouve le maximum principal en tenant maintenant son DVA horizontalement. S'il ne trouve pas de deuxième maximum, il lui faut creuser sous le premier. Le rayon du cercle est une fois et demi la distance de perte du signal quand on s 'éloigne du premier maximum.
Figure 9 : Méthode « tilt » avec un DVA enfoui horizontalement (a) et avec un DVA enfoui verticalement (b).
- Méthode tilt en deux figures [5] : Pour les possesseurs de DVA récents (2 antennes).
La méthode « tilt » est une méthode rapide de recherche finale, mais la localisation est peu précise. Le chercheur se déplace en gardant son DVA assez haut. Quand il atteint un minimum (DVA enfoui horizontal) ou un maximum (DVA enfoui vertical) de signal, il oriente son DVA vers le bas pour suivre la ligne de champ jusqu'à la surface de la neige. On voit sur la figure 9 que le DVA enfoui n'est pas à la verticale du point atteint et le chercheur doit extrapoler la suite de la ligne de champ en fonction de l'angle d'entrée de cette ligne dans la neige. Cette méthode est efficace si le DVA est peu profondément enfoui, et uniquement avec des DVA numériques à 2 antennes, pour suivre précisément la ligne de champ. Il faut deviner si le DVA enfoui est plutôt horizontal ou vertical (assez rare). Si la profondeur est grande, il faut revenir à la méthode en croix.
5- Dernière étape de la localisation fine.
Il faut sonder pour vérifier la localisation et avoir une idée de la profondeur d'ensevelissement. Le sondage se fait perpendiculairement à la pente et non pas verticalement. Pensez à sortir votre sonde et à la monter pour savoir comment faire en cas d'accident. Pour garantir une longue vie à votre sonde, et un sondage efficace, regardez les figures 10 et 11.
Figure 10 : tenue de la sonde pour ne pas la tordre.
Figure 11 : diagramme de sondage. On commence au point A déterminé à l'aide du DVA, puis on sonde en spirale en tournant autour de A, avec un écartement de 30 cm environ entre les points.
Figure 12 : Le dégagement.
La localisation est terminée, il reste à pelleter efficacement. Laisser la sonde en place et pelleter en aval en évacuant la neige vers le bas. Evitez de piétiner au niveau de la sonde pour ne pas tasser la neige et effondrer une éventuelle poche d'air au niveau de la victime. Si la profondeur est importante, pensez à aménager une terrasse en aval, facilitant le pelletage, le dégagement et les secours. Eteignez le DVA de la victime, surtout si les recherches d'autres victimes continuent.
Comment s'entraîner ? Pour débuter, mettre un DVA près de la surface.
Quand on maîtrise la méthode en croix, cacher un DVA dans un terrain accidenté, en pente, si possible dans une coulée d'avalanche, pour se familiariser avec les problèmes de terrain irrégulier pendant une recherche finale.
Cacher un DVA si possible à plus d'un mètre de profondeur dans un sac à dos ou sous une planche de contre plaqué de 50cm de côté environ pour pouvoir sonder.
Tester les autres méthodes .
Dégager un trou de un mètre de profondeur avec accès pour secourir la personne au fond, ça à l'air tout bête, mais mieux vaut avoir dégagé une fois une fausse victime à 1 ou 2m de profondeur avant l'accident que de se demander comment faire un trou avec accès commode pour les secours au moment de l'accident.
Conclusion :
Trouver une victime est plus complexe que chercher un DVA en terrain plat sous 50 cm de neige. Mais cet exercice est la première étape à dominer. Pas besoin de neige pour s'initier, un DVA sous un paquet de feuilles en forêt ou sous 50cm de sable permet une première approche de toutes les phases de recherche. Les autres exercices en terrain accidenté et à grande profondeur sont plus difficiles à mettre en oeuvre mais sont tout aussi importants. La troisième partie va aborder les cas d'enfouissement multiple. Pour les résoudre, il faut déjà maîtriser les techniques de recherche d'une seule victime.